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Une proposition de loi pour permettre aux salariés de demander jusqu’à 5 acomptes sur salaire

Une proposition de loi, déposée à l’Assemblée nationale le 4 juin 2025, envisage de permettre aux salariés, sous conditions, de demander jusqu’à 5 acomptes sur salaire par mois. Ce texte entame son parcours législatif. Il n’est donc pas applicable en tant que tel.

Brefs rappels sur les acomptes

Les salariés mensualisés doivent être payés au moins une fois par mois (c. trav. art. L. 3242-1). Un acompte correspondant, pour une quinzaine, à la moitié de la rémunération mensuelle est obligatoirement versé à ceux qui en font la demande (c. trav. art. L 3242-1).

Rappelons que l'acompte sur salaire consiste à rémunérer un travail déjà effectué avant son échéance normale (ex. : versement le 15 juin du salaire des 15 premiers jours de ce mois alors que l’échéance normale est la fin du mois). Il se distingue de l’avance sur salaire, qui porte sur un travail qui n’a pas encore été réalisé (ex. : versement du salaire de juillet en juin).

À noter : La mensualisation concerne tous les salariés à l’exception des travailleurs à domicile, des salariés intermittents, des salariés saisonniers et des travailleurs temporaires. Pour ces salariés, le code du travail ne prévoit pas de droit à l’acompte. Il faut se référer aux accords collectifs et aux usages d’entreprise. En l’absence de précision, l’employeur est libre de verser un acompte ou non. Par ailleurs, un droit à l’acompte s’applique pour les salariés payés aux pièces et pour les VRP, mais selon des règles spécifiques.

Côté charges sociales, on rappellera enfin que les acomptes sur salaire ne donnent, en principe, pas lieu à cotisations de sécurité sociale au moment de leur versement. En pratique, c’est à l’occasion du paiement du reliquat de salaire que les cotisations dues sur l’ensemble de la rémunération sont calculées.

Vers la possibilité de verser jusqu’à 5 acomptes sans dépasser la moitié du salaire

Une proposition de loi (PPL) déposée à l’Assemblée nationale le 4 juin 2025 envisage de réécrire la disposition relative au droit à l’acompte des salariés mensualisés (voir ci-avant) (c. trav. art. L. 3242-1, al. 3).

Précisons d’emblée que cette proposition n’est toutefois qu’en l’état de projet (voir encadré).

Selon l’exposé des motifs de la PPL, le texte viserait à garantir aux salariés une plus grande flexibilité dans la gestion de leurs ressources financières et leur éviter le crédit à la consommation ou le découvert bancaire, pour faire face à des imprévus. De plus, elle permettrait aux salariés de solliciter un acompte « sans risque de refus abusif, [en offrant] la possibilité d’adapter leurs rentrées d’argent à leurs besoins immédiats et d’éviter des situations de précarité évitables ».

Pour se faire, des acomptes pourraient toujours être versés en cours de mois au salarié qui en fait la demande, sans justification (précision nouvelle).

La (vraie) nouveauté porterait sur le nombre d’acomptes versés par mois, qui ne pourrait excéder 5. Comme aujourd’hui, le montant total des acomptes par mois ne pourrait pas lui-même dépasser la moitié du salaire mensuel.

À noter : l’exposé des motifs indique que le droit existant garantit uniquement le versement sur demande de la moitié du salaire à la moitié du mois, « ce qui pousse les salariés ayant recours à ce dispositif à y avoir recours tous les mois ensuite ».

Un décret nécessaire pour les conditions de mise en œuvre

La PPL renvoie à un décret pour le détail des contraintes à respecter pour le versement de l’acompte ainsi que les modalités d’information du salarié sur son droit à demander des acomptes.

On notera que l’exposé des motifs précise que le décret d’application définira notamment :

-les motifs légitimes pour lesquels un employeur pourrait refuser un acompte (ex. : en cas de difficultés de trésorerie avérées) ;

-les modalités de versement et les obligations administratives afférentes.

Quel serait l’impact pour les services paye ?

Concernant l’impact sur les services paye, selon l’exposé des motifs, il n’y en aurait pas (ou très peu), puisque « les avancées technologiques permettent aujourd’hui, de la demande par le salarié à son traitement en paie en passant par son versement, une gestion complètement automatisée et instantanée des acomptes sur salaire via des plateformes numériques, minimisant ainsi la charge administrative pour les employeurs ».

Les gestionnaires paye, en particulier, seront peut-être d’un autre avis. On peut s’interroger sur la mise en pratique du dispositif en présence de nombreuses demandes à traiter (jusqu’à 5/mois) de plusieurs salariés. Quand bien même le logiciel de paye verserait les acomptes automatiquement, ne serait-ce que le temps passé à recevoir et répondre aux demandes risque de peser un peu plus sur les services paye…

Un texte qui n’est pas encore inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée
À l’heure où nous rédigeons ces lignes, la proposition de loi (PPL) a été déposée à l’Assemblée nationale. Le texte a été renvoyé à la commission des affaires sociales qui va l’examiner au fond. Pour que la PPL soit discutée en séance publique, il faut qu’elle soit inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Ce n’est pas le cas, selon le dernier calendrier connu, qui court jusqu’au 27 juin 2025. Une fois inscrite à l’ordre du jour, la PPL poursuivra son parcours législatif devant le Parlement et deviendra applicable, le cas échéant, une fois définitivement adoptée et parue au Journal officiel.

Proposition de loi relative aux acomptes visant à assurer plus de souplesse aux salariés et aux agents publics dans la perception de leur rémunération, déposée le 4 juin 2025 à l’Assemblée nationale ; https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/textes/l17b1509_proposition-loi