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Pourboires

La majoration volontaire d'une facture à la demande d'un client à titre de pourboires est soumise à cotisations

Les pourboires, sommes reçues des clients avec lesquelles les salariés sont en contact dans l'exercice de leurs fonctions, constituent du salaire pour leurs bénéficiaires. Ils doivent être pris en compte pour le calcul des cotisations sociales dès lors qu'ils sont remis à l'employeur pour qu'il les reverse au personnel. C’est ce qu'a rappelé la Cour de cassation le 5 juin 2025. Dans cette affaire, les pourboires prenaient la forme d’une majoration de facture demandée par le client, enregistrée sur un compte d'attente avant reversement aux salariés.

Régime social et fiscal des pourboires : rappels

Les pourboires sont soumis aux cotisations de sécurité sociale (c. séc. soc. art. L. 242-1, I), à la CSG et à la CRDS (c. séc. soc. art. L. 136-1-1, I), ainsi qu'à l’ensemble des prélèvements calculés sur la même assiette (assurance chômage, AGS, versement mobilité, contribution solidarité autonomie, FNAL, retraite complémentaire, etc.).

S’ils sont centralisés par l’employeur, ils s’ajoutent à la rémunération soumise aux cotisations sociales, à la CSG et à la CRDS pour la part revenant à chaque salarié (arrêté du 28 mars 1956, JO du 30).

Lorsqu'ils sont perçus directement par le salarié et que l’employeur n’en connaît pas le montant, l’assiette des cotisations ne peut pas être inférieure à l’assiette minimale, c’est-à-dire le SMIC ou le minimum conventionnel augmenté des majorations légales ou conventionnelles. Le salarié a l’obligation de reverser à l’employeur la part salariale des cotisations (c. séc. soc. art. L. 241-7).

À noter : Un dispositif exceptionnel d'exonération sociale et fiscale des pourboires remis à certains salariés, s’applique sur les années 2022 à 2025 (loi 2025-127 du 14 février 2025, JO du 15 ; voir Dictionnaire Paye, « Pourboires »).

La lecture de l'arrêt traité ci-après s’entend, bien entendu, hors application de ce dispositif temporaire.

L’affaire : un redressement portant sur des pourboires volontaires laissés en plus du service

Une URSSAF avait notifié à une société une lettre d'observations du 25 juin 2016 comportant divers chefs de redressement, dont la réintégration dans l’assiette des cotisations de pourboires.

La société avait saisi la justice. Elle faisait grief à l’URSSAF d’avoir réintégré dans l’assiette des cotisations ce qu'elle qualifiait de « pourboires-libéralité » .

Selon la société, les pourboires en cause, accordés librement par le client, en plus du coût du service déjà inclus dans la facturation, avaient le caractère d’une libéralité. Ils n’étaient donc pas de la même nature juridique que les pourboires dûs, qui eux, sont inclus au titre du service dans la facturation du prix de la prestation.

La société estimait ainsi que ce type de « surpourboire » devait être exclu de l’assiette des cotisations.

La cour d’appel avait rejeté la demande de la société, estimant que le redressement portant sur la réintégration des pourboires dans l'assiette des cotisations était justifié.

L’affaire est arrivée devant la Cour de cassation qui s’est ralliée à la position des juges du fond.

Tous les types de pourboires sont soumis à cotisations sociales dès lors qu'ils sont remis à l'employeur pour qu'il les reverse au personnel

La Cour de cassation commence par rappeler que les pourboires sont assujettis aux cotisations de sécurité sociale (c. séc. soc. art. L. 242-1, I).

Puis la Cour souligne que dans tous les établissements commerciaux où existe la pratique du pourboire, sont intégralement versées au personnel en contact avec la clientèle (c. trav. art. L. 3244-1) :

-toutes les perceptions faites « pour le service » par l'employeur sous forme de pourcentage obligatoirement ajouté aux notes des clients ou autrement ;

-ainsi que toutes les sommes remises volontairement par les clients pour le service entre les mains de l'employeur, ou centralisées par lui.

Il en résulte que les sommes volontairement remises à titre de pourboires par les clients à destination du personnel en contact avec la clientèle sont soumises à cotisations sociales dès lors qu'elles sont remises à l'employeur pour qu'il les reverse au personnel.

Or, dans cette affaire, les juges d’appel avaient constaté que :

-d’une part, lorsqu'un client de la société, ne disposant pas d'espèces, voulait régler un pourboire, la facture de la prestation y donnant lieu était, à sa demande, majorée du montant qu'il fixait, lequel était soit porté sur le compte de sa chambre, soit réglé immédiatement par carte bancaire ;

-d’autre part, les pourboires ainsi laissés par les clients étaient collectés et enregistrés sur un compte d'attente de transit, avant d'être reversés aux salariés pour la part de pourboires leur revenant.

La cour d’appel en avait déduit que ces sommes, qui avaient été remises à la société par des tiers, à l'occasion du travail de ses salariés, et qu'elle leur avait reversées en sa qualité d'employeur, en organisant leur répartition par les responsables de service, devaient être assujetties à cotisations.

Un raisonnement validé par la Cour de cassation, pour qui le redressement portant sur la réintégration des pourboires dans l'assiette des cotisations était dès lors justifié.

cass. civ., 2e ch., 5 juin 2025, n° 23-13543 FB